Les enseignements 2023 - 2024

La section clinique de Bordeaux aura pour thème :

Fantasme, rêve et délire 

Vers les Institutions

Paroles et actes en institution

Le 31 mai 2024


Quelle place a la parole en institution aujourd’hui alors que, dans certains lieux, le patient tend à être réduit à une unité comptable, voire à un élément à adapter ?

Le discours managérial tente d’organiser le soin à l’aulne de la comptabilité. La psychiatrie n’a plus les moyens de prévenir les passages à l’acte, et les institutions sont fragilisées dans leur démarche d’accueil et de soin.

Il y a donc urgence à s’interroger sur un certain nombre de défis posés par le rôle et l’usage des institutions aujourd’hui.

Rappelons qu’avant tout, toute institution est fondée sur l’ordre symbolique, incarnée dans le discours. Or, la parole est souvent discréditée dans sa valeur de vérité par le cynisme ambiant ou par la pente au tout neuro. Elle est alors ravalée au rang de reformatage des circuits neuronaux, de l’adaptation, ou bien il est naïvement supposé qu'elle puisse se réduire à de bons mots qui produiraient un effet de soulagement !

Lacan nous a invités à ne pas reculer devant la psychose. Les repères cliniques enseignés par la psychanalyse permettent de faire face au risque suicidaire, de résoudre souvent les impasses de vie du sujet, et de mieux traiter les troubles de l’humeur.

Il s’agit d’entendre ce que des sujets souffrants ont à dire, aussi terrifiante ou désespérante que puisse leur paraître leur détresse.

Pour cela, il y a à concevoir toute institution comme un abri susceptible de leur permettre de trouver une voie plus acceptable, plus viable.

Cet après-midi est le premier d’un cycle « Vers les institutions ». Il  sera consacré au thème « Paroles et actes en institution » au travers de la clinique d'un certain nombre d'institutions de la région Aquitaine et au-delà, puisque cette journée accueille Fabien Grasser, psychanalyste et psychiatre à Paris, membre de l'ECF et enseignant de la Section clinique de Paris Ile-de-France.

 

Première Session 

Lectures à partir du Séminaire XIV

Du 10 novembre 2023 au 16 février 2024


Jacques-Alain Miller a pu dire que ce Séminaire sur la logique du fantasme, qui est paru en 1967, était entièrement d’actualité aujourd’hui, ne serait-ce que par la place de l’imaginaire du fantasme dans nos vies, vouées aux écrans. Ce terme de fantasme évoque l’illusion, les fantômes et, surtout, l’imagination et l’imaginaire. C’est plus une activité qu’autre chose : on fantasme. On peut dire que les fantasmes sont ce qui permet au moi d’échapper à la réalité. L’idée de Lacan c’est que, derrière cette multiplicité, se cache un fantasme inconscient bien spécifique pour chaque sujet. Souvent ce fantasme est aussi à l’origine d’un symptôme névrotique. Si le sujet trouve du plaisir dans ses fantasmes il peut très bien ne rien vouloir savoir du fait qu’un fantasme le détermine, dans sa jouissance en particulier. Cette action du fantasme le sujet la méconnait car ce qui est actif dans le fantasme c’est ce que le fantasme a de réel. C’est sur la trace de la définition de ce réel que Lacan convoque la logique moderne et la théorie des ensembles.

On peut s’interroger sur le poids des fantasmes. L’idée de Lacan c’est que ce poids est dû au fait que, comme il le dit, il n’y a pas d’acte sexuel parce qu’il n’y a pas de de rapport sexuel dans l’inconscient. Cela veut dire que rien ne permet d’inscrire notre rapport à un sexe ou à l’autre sexe de façon stable et définitive. Le fantasme est ce qui supplée à l’absence du rapport sexuel. Souvent il permet la rencontre des sexes mais, souvent aussi, il peut être la source même de la haine. La psychanalyse vient mettre un peu de logique dans tout cela, c’est ce qui fait son actualité et son intérêt.

 



Cours du jeudi

Faire une analyse

Du 16 novembre 2023 au 11 avril 2024


Faire une analyse, qu’est-ce que ça change ? Le cours du jeudi portera cette année sur l’expérience même d’une psychanalyse. Comment et pourquoi en vient-on à s’adresser à un analyste ? Quelle méthode a permis à Freud de découvrir l’inconscient dont chacun est le sujet ? Pourquoi est-ce par la parole et le langage que des effets singuliers peuvent y jouer ? Qu’est-ce qu’une interprétation analytique, que vise-t-elle ? Quelles différences y-a-t-il entre la psychanalyse et les thérapies ? Quelles métamorphoses subjectives peuvent s’y produire ? A qui s’adresse l’analyse ? Y a-t-il des contre-indications à l’analyse ? Jusqu’où est menée une analyse ?

A partir de l’œuvre de Freud et de l’enseignement de Lacan nous aborderons ces questions fondamentales d’une expérience à nulle autre pareille.



Deuxième Session 

Les maladies de la Psychiatrie

Du 8 mars 2024 au 21 juin 2024 


Selon l’OMS « en 2019, une personne sur huit dans le monde – soit 970 millions de personnes – présentait un trouble mental. En 2020, le nombre de personnes atteintes de tels troubles a augmenté considérablement du fait de la pandémie de COVID-19. Les premières estimations indiquent une hausse de 26 % et 28 %. »

L’épidémie révèle le lien entre la maladie mentale et le lien social mis en crise par le virus. Elle révèle aussi au mieux l’échec du projet scientiste qui anime les décisions en psychiatrie depuis 50 ans : élimination de la clinique par la classification du DSM, suppression de l’approche relationnelle par l’idée de maladie du cerveau, domination de la chimie, toutes choses qui mettent à mal la psychiatrie.

Par ailleurs, on veut supprimer la dimension complexe du symptôme en lui substituant la catégorie cannibale de troubles neurodéveloppementaux et de troubles dys en tout genre. La psychanalyse apporte autre chose. Lacan en 1966 remarquait : (…)  en effet, ce qui apparaît, qui peut fort bien se manifester, c’est qu’il y a quelque chose qui ne va pas du côté de la compréhension, quand on est en présence de ce qui, tout de même il faut le dire, est le cœur, le centre du champ du psychiatre et qu’il faut appeler par son nom : c’est le fou. Psychotique, si vous voulez[1]. »  Plutôt que cette « compréhension » empathique et humaniste l’analyste et l’analysant peuvent partager avec le fou ce que Lacan a appelé une « fraternité discrète »[2]. Car c’est dans l’analyse que se révèle au mieux ce qui fait le cœur du malaise dans la civilisation.

 

Jacques-Alain Miller fait remarquer que cette fraternité a cessé d’être discrète [3] et que, au nom de l’égalité de tous, c’est plutôt la formulation plus tardive de Lacan qui prévaut : « tout le monde est fou »[4] qui signe la dépathologisation à l’œuvre dans le monde actuel. Mais pas seulement.

La phrase complète de Lacan est celle-ci : « Freud a considéré que rien n’est que rêve, et que tout le monde (…) est fou, c’est-à-dire délirant. »

Voici le champ ouvert du rêve à la folie et au délire qui est aussi bien le champ de la psychanalyse et de la clinique.



[1] Lacan J., « Petit discours au psychiatre, » 1966, en ligne.

[2] Lacan J., « L’agressivité en psychanalyse », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 124.

 

[3] Miller J.-A., « Tout le monde est fou », argument du XIVe Congrès de l’AMP, en ligne.

[4] Lacan J., « Lacan pour Vincennes ! », Ornicar n° 17/18, printemps 1979, p. 278.


Atelier de Psychanalyse Appliquée (APA)

Les délires, leurs inventions, leurs variations. 

Du 16 décembre 2023 au 22 juin 2024


L’APA s’adresse à des personnes souhaitant pratiquer dans un des CPCT d’Aquitaine.

Il constitue une formation préalable à cette pratique et à cette clinique. L’atelier se tient le samedi matin de 10h à 13h au 26, rue du Hâ à Bordeaux.

D’abord il y a l’idée délirante. Quand elle se maintient on considère qu’il s’agit d’un délire.

Longtemps les délires étaient étudiés par le biais de la variété de leurs thèmes ou de leurs objets. En posant le fait  d’un état délirant on va s’intéresser plutôt à la personne qui est le sujet du délire. Lacan dans sa thèse est parti de ce rapport du délire paranoïaque à la personnalité. Il a fallu ensuite passer à la psychopathologie du délire. Pour Freud la fonction essentielle du délire est de fournir au sujet un moyen de maintenir une réalité dans la situation où cette réalité, entre le moi et le monde, est perdue. C’est une solution qui emprunte aux divers complexes et elle est donc une tentative de guérison. Pour Lacan dès le départ le délire n’est pas à mettre sur le compte de l’erreur mais de la croyance. En cela le délire est une méconnaissance qui suppose une forme de connaissance et qui ne relève donc pas du déficit. Dans son étude du cas Schreber de Freud, Lacan va montrer que le délire est une métaphore qui vient là où la métaphore paternelle a échoué pour un sujet. Il montrera aussi comment ce qui est forclos et rejeté fait retour dans le réel pour le sujet, dans l’effet de forclusion. Freud ne cantonnait pas le délire à la psychose : « Si l’on considère l’humanité comme un tout, et qu’on la mette à la place de l’individu isolé, on trouve qu’elle a aussi développé des délires inaccessibles à la critique logique et contredisant la réalité ». In "Constructions dans l’analyse".  Freud pensait que souvent ces délires étaient reliés à une réalité historique. Cela ouvre la question de savoir si « tout le monde délire » selon le mot de Lacan, à une époque où les images et l’idée du complot tiennent lieu de réalité. L’examen de divers textes et l’étude de cas cliniques éclairant les réponses à donner à ces délires seront examinés dans l’année.